Tout au long de ma petite vie certains événements m’ont particulièrement marquée. Il en fut un particulièrement : l’incendie du 5-7 à Saint-Laurent-du-Pont en Isère le 1 novembre 1970.
146 morts âgés de 14 à 25 ans dont beaucoup de jeunes de Chambéry en Savoie.
Des filles du lycée avaient l’habitude d’aller danser au 5/7 à une trentaine de km. Nous étions une « génération dansante » et les plus jeunes partaient en car gratuit de Chambé.
J’avais 14 ans. Enfant taciturne et frustrée, je n’avais pas d’argent de poche et surtout, à cette époque, je n’avais pas le droit de sortir, encore moins dans un dancing même en car gratuit … bref j’enviais quelque peu la liberté de certaines.
Je me rappellerai toujours le vide dans la classe et dans la cour, après ce funeste WE de la Toussaint. Mais personne n’a fait allusion à ce drame. On ne communiquait pas à cette époque.
A l’internat les fenêtres de la salle d’étude donnaient sur le gymnase Jean-Jaurès et son petit stade. Le gymnase avait été transformé en chapelle ardente pour accueillir les familles de Chambéry et alentours. J’ai vu arriver les corbillards, les parents, camarades de classe, frères et sœurs des victimes. J’ai vu le défilé des cercueils … C’est là que j’ai vraiment pris conscience du drame qui s’était déroulé …
Plus tard, avec une copine nous sommes allée soutenir une maman dont rien n’avait été retrouvé de sa fille, ou peut-être qu’une gourmette, je ne me souviens plus. Ma copine la connaissait très bien.
Après la tragédie, des rumeurs de toutes sortes avaient circulé sur le 5/7, et cette maman était persuadée qu’il se passait des choses douteuses au 1er étage. Pour elle, sa fille avait été enlevée pour la traite des blanches. Elle était persuadée qu’elle la reverrait un jour …
Il n’y avait pas de cellule psychologique, pas de soutien pour les familles, rien. Tout juste si on ne les culpabilisait pas d’avoir laissé sortir leurs gosses. Et il a fallu qu’elles continuent à vivre avec ça …
Horrible !
A chaque Toussaint j’y pense …