Plus de 3 ans de chômage, trop âgée pour les employeurs (j’ai 61 ans et 8 mois), et surtout à 4 mois de la retraite, patatras je ne bénéficie plus de l’allocation de retour à l’emploi (75 % de mon dernier salaire) et me retrouve « ASSiste », c’est à dire bénéficiaire de l’Allocation de Solidarité Spécifique de 16,48 € par jour (équivalant RSA).
Et non l’allocation chômage n’est pas éternelle pour ceux qui croient que…
Bref, chercher une mission, un CDD est devenu vain depuis une bonne année. Je n’obtiens plus de RV, plus rien. Curieusement les offres actuelles sont pour des CDI pour lesquelles je ne peux plus prétendre. Ben oui à 4 mois de la retraite …
Du coup c’est la grosse bascule bien brutale dans la pauvreté, sans allocation logement parce que je ne rentre pas encore dans les critères qui vont bien, sans CMU, sans autre aide sociale que l’ASS, rien de plus qui coûte un pognon de dingue !
De toute façon je ne rentre jamais dans les critères, d’autant moins que les calculs savants des organismes sociaux se basent sur les 2 années précédant la bascule dans la misère totale. Donc forcément faut patauger au moins 1 année complète dans la plus grande merde, pour pouvoir commencer à prétendre au forfait alloc logement et arriver à peu près à 750 € par mois maxi tout compris pour une personne seule. Non l’alloc logement ne couvre pas le montant total du loyer, c’est un forfait !
En attendant il faut que je fasse avec mes 510,88 € les mois de 31 jours, et que je me démerde pour couvrir mes 959,77 € de charges fixes (je suis locataire, et paie encore la taxe d’habitation, et j’ai bien sûr une mutuelle pas donnée que je ne peux supprimer). Et il faut bien se nourrir aussi…
Et je me sens coupable !
Oui je fais partie de ces assistés de chômeurs, salauds de pauvre irresponsables, prétendus illettrés de surcroît, montrés du doigt par les Sarkosy/Wauquiez/Macron and co depuis des années, critiqués par ceux qui croient qu’on cumule les aides et qu’on touche un max, et surtout qu’on utilise nos indemnités pour glander en vacances.
Ces bourrages de crâne politico-médiatiques permanents qui montent les pauvres les uns contre les autres, ont fait que la culpabilité s’est incrustée sournoisement en moi.
Et..
Je me sens coupable parce que je ne suis pas arrivée à me sortir du chômage. Je me sens coupable parce que j’ai complètement raté ma carrière professionnelle.
Je me sens coupable d’avoir vécu une grande partie de ma vie dans la précarité et la pauvreté.
Je me sens coupable de ne pas avoir été une mère qui assure suffisamment financièrement pour aider ses enfants, bien que les ayant élevée seule.
Je me sens coupable comme s’il était honteux de me retrouver dans une telle situation. Je sors rarement de chez moi, je ne vois personne, je ne parle à personne. je fais toutes mes démarches en ligne pour ne pas me retrouver face aux fokon-yakas et à tous ces bons conseilleurs qui savent tout sur tout sans avoir rien vécu, et surtout pas ma vie. Je ne profite même pas de la mer si proche…
Je me sens coupable aussi parce que dimanche je vais à un concert. J’ai acheté mon billet en décembre 2017, avec des économies faites sur mes indemnités de chômage que je touchais encore l’année dernière. Bref me suis offerte mon Noël ! Mais je me sens quand même coupable.
Bénéficier de l’ASS aujourd’hui et aller à un concert, salaud de pauvre tu ne te fais pas chier quand même, la vie est belle pour toi !
Je me sens coupable parce que… je profite du décès de ma mère pour survivre. Grâce à son assurance vie je vais pouvoir compléter mes 500 € mensuel jusqu’à la retraite pour payer mes charges, et surtout garder mon toit sur la tête, ma mutuelle santé, mon smatphone et ma voiture. J’ai fait le calcul pour que ça bouche l’énorme trou jusque là.
J’avoue ! la mort de ma mère m’arrange bien. Je ne finirai pas à la rue !
Et oui, c’est comme ça les choses de la vie. C’est malheureux à dire (quoi que), mais merci maman d’être décédée. Au final ta psychotique de fille va s’en sortir grâce à toi, dans un premier temps jusqu’à novembre. Step by step…
Je me sens coupable …
Mais merde quoi, pourquoi je ne devrais pas profiter sereinement de ce qui me tombe dessus légalement alors que je n’ai rien, et surtout pas ces aides sociales bien trop compliquées à obtenir, mais qui coûtent un pognon de dingue à Jupiter !
Bah non, finalement pas de quoi culpabiliser !